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Cyrano De Bergerac, Opéra Montpellier, March 2006
Photo from Opéra Montpellier

Le panache de Cyrano, Les Échos, 23 March 2006
Cyrano de Bergerac, Opéra de Montpellier, Financial Times, March 21 2006
Roberto Alagna, "Cyrano" hors de pair, Le Monde, 25 March 2006
Cyrano cocorico!, Res Musica, 25 March 2006 [external link]
Alagna, le coeur et le panache, Le Journal des Spectacles, 26 March 2006
En familia, Opera Ayre, 3 April 2005 [external link]
Cyrano de Bergerac, Ópera Actual, May 2006
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Le panache de Cyrano
Michel Parouty, Les Échos, 23 March 2006

Un ténor populaire incarne un personnage de légende : succès assuré.

Avec Roberto Alagna, Nathalie Manfrino. Mise en scène : David et Frederico Alagna. Direction musicale : Marco Guidarini. Représentation du 16 mars.

Ce spectacle, c'est, en quelque sorte, un rescapé. En 2003, le Festival de Radio France et de Montpellier l'avait mis à son programme ; les manifestations furent annulées, en cet été qui entendit les protestations des intermittents. Une représentation eut lieu, pourtant, sans être ouverte au public, et elle fut filmée. Edité par Deutsche Grammophon, le DVD permit d'entendre cet ouvrage rare, créé à Rome en janvier 1936 dans sa version italienne, repris à l'Opéra-Comique de Paris, dans l'original français. Franco Alfano (1875-1954), son auteur, est entré dans l'histoire pour avoir achevé, à la demande du fameux chef d'orchestre Arturo Toscanini, le dernier acte de la « Turandot » de Giacomo Puccini. En rester là, c'est faire peu de cas d'un compositeur sensible, orchestrateur raffiné, marqué par Claude Debussy et Richard Strauss, dont Montpellier, toujours friand de redécouvertes, avait présenté l'émouvant « Risurrezione » d'après Tolstoï.

Si le livret d'Henri Cain respecte la pièce, il opère aussi quelques coupes, dont la pétulante « tirade des nez », ce dont on ne se plaindra pas. La comédie héroïque d'Edmond Rostand avait inspiré un autre musicien, Walter Damrosch, pour un « Cyrano » donné à New York en 1913 et vite oublié.

Réelle noblesse

Celui d'Alfano sortira-t-il définitivement de son purgatoire ? Certaines scènes, la déclaration d'amour par personne interposée, ou tout le dernier acte, poignant, le méritent amplement ; et la direction de Marco Giudarini, au lyrisme mesuré, souligne les clairs-obscurs de la partition donnée ici dans son intégralité, lui conférant une réelle noblesse, et montrant comment la musique colore d'émotion des vers de mirliton faciles et complaisants. Scrupuleusement et sagement illustré par David et Frederico Alagna, ce livre d'images sert, on s'en doute, d'écrin pour mettre en valeur le héros du jour, leur frère, le fringant Roberto. Souffrant, voici quelques semaines, et contraint d'annuler, entre autres, ses « Manon Lescaut » de Turin, le ténor français a retrouvé sa forme et ses admirateurs lui ont réservé un triomphe. Il est vrai que dans cet emploi dont le premier interprète fut un autre Français, José Luccioni, il est irrésistible et ne connaît que peu de rivaux, à l'exception de Placido Domingo, qui s'est emparé du rôle voici quelques mois - la comparaison entre l'aîné et le cadet devrait être passionnante. Alagna, c'est avant tout un timbre d'une incroyable lumière, une émission haute, franche, une diction dont la clarté est exemplaire. Avec ses emportements, ses élans de tendresse, sa fougue, Cyrano lui va comme un gant, et il lui apporte une jeunesse et un naturel qui secouent sans la perturber l'idée qu'on se fait du cadet de Gascogne que sa laideur rend différent pour ceux qui ne s'attachent qu'aux apparences.

Autour de lui, une équipe qui partage son enthousiasme, Nathalie Manfrino, Roxane à la voix fraîche, Philippe Georges, De Guiche présomptueux, Pierre-Yves Pruvot, bon Ragueneau, et Richard Troxell, qui, comme dans l'enregistrement, campe un Christian sans grand charisme. Reste à savoir si l'effet de cette résurrection sera durable, et si l'on reverra à la scène, en France, « Sakkuntala », qui passe pour être le chef-d'oeuvre d'Alfano.
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Cyrano de Bergerac, Opéra de Montpellier
Francis Carlin, Financial Times, March 21 2006

Health bulletin: Roberto Alagna is back from illness and singing in French with style. The top may sound a little frayed but his easy diction and mastery of line are as good as ever.

Health warning: roping in his brothers David and Federico as producer and designer is a disastrous example of keeping it in the family. Cyrano was filmed for DVD in 2003 at the Montpellier Festival but staged performances were thwarted by labour unrest, so this was our first opportunity to see how the siblings coped with real conditions. But without camera close-ups, their staging is at best enlightened amateurism that starts well but touches rock bottom at the siege of Arras, where all hands clumsily enact tableaux vivants. Dusty, fusty sets of a granite château and a convent cloister remind us how dreary "traditional" can be.

The principals are the same as on the DVD: Nathalie Manfrino is a touching Roxane and the American Richard Troxell as Christian shows off superb French. Marco Guidarini conducts a sterling account of Alfano's score as it veers from Puccini to Debussy, a well-made piece of astute symphonic complexity that often seems on the verge of saying something memorable, then holds back. It is Francesco Cilèa without the tunes. The real problem is the vocal line, which chokes on Rostand's alexandrines, though composer and librettist wisely ducked the tirade du nez.

Alagna's curtain calls took me back years, to when people really got worked up at the opera. But it is not Alfano's triumph; his memory is better served by his much earlier Risurrezione (1904), a meaty verismo drama based on Tolstoy that Montpellier revived and recorded in 2001
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Roberto Alagna, "Cyrano" hors de pair
Marie-Aude Roux, Le Monde, 25 March 2006

Le Cyrano de Bergerac de Franco Alfano (1875-1954) porterait-il la guigne aux ténors ? Après Placido Domingo, qui en février a déclaré forfait au Metropolitan de New York dans la production mise en scène par Francesca Zambello (reprise en avril-mai au Covent Garden de Londres), le ténor français Roberto Alagna a dû annuler, en cours de représentation, la deuxième du Cyrano monté à l'Opéra national de Montpellier le 18 mars, vaincu par une bronchite doublée d'une trachéite. Quelques jours plus tard, bien que toujours souffrant, le chanteur assurait avec un panache tout cyranien la représentation du 22 mars.

Le même Cyrano porterait-il la guigne aux maisons d'opéra ? Déjà à l'été 2003, le Festival de Radio France Montpellier avait annulé ce spectacle, pour cause de conflit avec les intermittents du spectacle. L'absence de représentations ayant été mise à profit pour tourner un DVD paru en 2005 chez Deustche Grammophon (Universal), on avait pu quand même apprécier l'interprétation magistrale d'Alagna dans le rôle de l'amant magnifique porté par Edmond Rostand à la scène en 1897. Enfin sur scène, même privé de l'intégralité de ses moyens, Alagna reste un Cyrano hors de pair, hâbleur et tendre, le seul aujourd'hui à pouvoir incarner avec une telle rigueur de diction et un tel art des clairs-obscurs les beaux vers de Rostand.

La partition d'Alfano, jouée ici dans sa version originale de 1935, avec le rétablissement des coupures pratiquées par les héritiers du compositeur, ne prétend certes pas au chef-d'oeuvre, qui rassemble Puccini, Richard Strauss et Debussy, voire Ravel. Mais l'acte final, l'aveu et la mort de Cyrano, est magnifique, ainsi que certains numéros comme la fameuse scène du balcon, où Roxane s'abandonne aux baisers de Christian sous la caresse des mots d'amour de Cyrano.

La gracieuse Nathalie Manfrino, si fraîche et frémissante au DVD, déçoit un peu, les aigus manquant de rondeur et la ligne s'empâtant parfois d'un vibrato intempestif, que devrait contrôler davantage la "révélation lyrique des Victoires de la musique 2006".

Le reste de la distribution est de bonne compagnie, avec une mention spéciale, comme on dit, pour le truculent et sensible Ragueneau de Pierre-Yves Pruvot, le Carbon fier et sans équivoque de Jean-Luc Ballestra et le Christian juvénile et fiévreux de Richard Troxell, sans oublier Christine Tocci en Duègne ni Philippe Georges en Guiche.

S'ils ne sont pas renversants de plasticité sonore, les Choeurs de l'Opéra et l'Orchestre national de Montpellier tirent leur épée du jeu, justement menés par le chef italien Marco Guidarini.

La mise en scène devrait faire du bien aux fatigués de la "malscène" dénoncée par Philippe Beaussant (La Malscène, éd. Fayard, octobre 2005). Difficile d'imaginer plus conventionnel que la "mise en tableaux" conçue par les frères Alagna, David et Frédérico.

La faute n'est ni aux costumes d'époque, ni aux décors carton-pâte façon Walt Disney, ni même à une direction d'acteurs qui se contente de panneaux de signalisation, mais à une conception élaborée pour la captation d'images et le montage futur des plans de cadrage. Le DVD est en effet une réussite.
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Alagna, le coeur et le panache
Caroline Alexander, Le Journal des Spectacles, 26 March 2006

On pourrait jouer au jeu des sept familles. Ainsi dans la famille Alagna, on demanderait le frère et on en aurait trois pour le prix d'un : Roberto, Sicilien de France, ténorissimo qui roucoule avec un égal bonheur Roméo, Werther, Rodolfo ou Luis Mariano, puis David et Frederico qui s'essaient à la mise en scène et aux décors de ce Cyrano de Bergerac que Franco Alfano (1875-1954) semble avoir composé spécialement pour eux. L'occasion est belle en tout cas de redécouvrir une uvre musicale totalement oubliée, mais dont le modèle parlé, signé Edmond Rostand, continue de faire les beaux soirs des théâtres et même du cinéma (le film d'Alain Corneau avec Gérard Depardieu illustre joliment la réussite du genre).

Au temps de Strauss, Debussy et Puccini

Napolitain, longtemps installé à Paris, Alfano connut de belles heures de gloire de son vivant, auteur de plusieurs opéras mis au placard depuis longtemps et dont seuls subsistent une Leggenda di Sakuntala et ce Cyrano enfin exhumé. Il vivait au temps de Richard Strauss, de Claude Debussy et de Giacomo Puccini et sa musique brasse allégrement leur style. Il avait tant et si bien assimilé le vériste Puccini qui laissa inachevé Turandot, son dernier opus, qu'on lui demanda d'en composer la fin. Ce dont il s'acquitta honorablement et qui continue son bonhomme de chemin. En terme de couture, on pourrait dire de lui qu'il était un bon faiseur, livrant du travail bien fait, bien fini, sur mesure mais sans grande originalité. Si Alfano n'a guère innové, il a en revanche parfaitement assimilé les particularités de ses contemporains. Son Cyrano de Bergerac, créé en 1936 d'abord en italien puis en français, en témoigne en parfait échantillon, avec un début très puccinien et une fin à la fois sobre et dramatique où l'on retrouve la veine théâtralisée du Debussy de Pelléas et Mélisande.  Le texte, adapté par Henri Cain, serre au plus près celui de Rostand à une notable exception : la célèbre tirade des nez n'a pas été mise en musique. Il n'en reste que quelques bouts de vers et le refrain de leur conclusion « à la fin de l'envoi, je touche »... Pour les amoureux de « l'oblongue capsule » et du perchoir tendu aux oiseaux, c'est un peu frustrant.

On se croirait chez Jérôme Savary

La production de l'Opéra National de Montpellier relève, côté mise en scène et décors, d'un premier degré tellement naïf qu'on ne sait pas trop s'il faut en rire ou s'en offusquer. « Au moins c'est facile à comprendre », commente un spectateur plutôt goguenard. Une muraille en carton-pâte marron découpée par des arcades sert de base aux différents lieux, de la taverne de Raguenau au cloître où s'est retirée Roxane. Rien ne manque à l'imagerie qui défile d'acte en acte, pas la moindre fumée, pas le plus petit détail de lierre grimpant sur les balcons ou de canon crachant les obus de la bataille d'Arras. Il y a même un cheval vivant qui traverse la scène et se fait applaudir comme s'il avait accompli un numéro de cirque. On se croirait chez Jérôme Savary, mais sans le recul, la dérision et ce clin d'il roublard qui en fait le charme.

Roxane, de Nathalie Manfrino, aux aigus de verre filé

Marco Guidarini, à la tête de l'Orchestre National de Montpellier, défend comme il se doit la partition et l'esprit qui la sous-tend, l'élégance et la bravoure. En Christian un peu mou, un peu pleutre, le ténor américain Richard Troxell fait oublier qu'il est le seul à ne pas être français dans une distribution honnête et homogène, où se détache la délicieuse, l'émouvante Roxane de Nathalie Manfrino, aux aigus de verre filé, « révélation artiste lyrique de l'année » aux dernières Victoires de la Musique. Et surtout celui qui est attendu, adoré, adulé : Roberto Alagna et son grand nez postiche, sa science de la scène, sa diction impeccable et son souffle qui porte aux cimes les ors légers de sa voix. Si dans les deux premiers actes il semble se fier à plus de métier que de générosité, il réussit en fin de parcours à rendre à son personnage ce qu'il lui doit : le panache et le coeur.
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Cyrano de Bergerac
Jaume Estapà, Ópera Actual, May 2006

En desagravio a los entuertos hechos al género lírico por tantos directores de escena desaprensivos, David y Federico Alagna se erigieron en cruzados de la tradición y garantizaron la fidelidad a la letra, con masivos decorados realistas en cartón piedra; se vitoreó la aparición de un caballo de verdad en el escenario. Roberto Alagna (Cyrano) estuvo irreprochable en el registro medio --emisión equilibrada, timbre agradable, vocalización comprensible del texto-- pero abusó del forte, lo cual introdujo monotonía y, al atacar los agudos, a menudo forzando, se le notaron temblores, imprecisiones y pérdida de timbre; los pasajes del forte al piano fueron inaudibles todos. Nathalie Manfrino (Roxane), expresiva en el registro lírico ligero, demostró su buena escuela y Pierre-Yves Pruvot (Rageneau) hizo lo propio con su presencia escénica y vocal. Richard Troxell (Christian), aunque irregular, consiguió en algún momento brillar con luz propia; sólo el De Guiche de Philippe Georges no alcanzó a convencer por falta de precisión. Los coros --Noëlle Geny-- se portaron muy bien en sus múltiples cometidos y obtuvieron un merecido aplauso. La orquesta, bajo la batuta de Marco Guidarini, desplegó con atención estudiosa la ambigua partitura de Alfano, vale decir una escritura con raíces múltiples, facilmente identificadas, poco o nada innovadoras en su época, pero muy agradable al oído.
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